Si ce n’est toi, c’est donc ton frère !
« La raison du plus fort, est toujours la meilleure : nous l’allons montrer tout à l’heure… »
L’odeur du Raz el anouf d’un couscous sur le feu, le goût de la coriandre dans un pad thaï… Et le voyage commence. Manger c’est déjà découvrir l’identité d’un pays.
Nous nous réjouissions à l’idée de tester de nouvelles saveurs, et pourtant. N’en déplaisent aux amateurs venus de loin, au Chili … pas de Chili (con carne) ! Assez peu de spécialités d’ailleurs. Santiago croule sous les restaurants japonnais, italiens, péruviens ou allemands. Mais qu’en est-il de leur gastronomie propre ? Quelques cazuela (entre le bouillon et le ragout), des mariscos (fruits de mer), un peu de saumon plus au sud, et du mouton ! De l’agneau essentiellement.
Plat de fête, il est aux chiliens, ce qu’est la dinde à notre Noël. Au four, mijoté, ou en asado (barbecue ou parilla en argentin), le Cordero est à tous les menus du nord au sud.
Nous notons d’ailleurs avec amusement que les moutons se mêlent aux nandus, maras et lamas. Ils sont aussi les protagonistes de concours régionaux. Un peu de chez nous dans ce bout du monde. Et on ne croit pas si bien dire…
Avant les colons, pas de moutons !
Après les expéditions au Sud de l’Amérique par plusieurs navigateurs espagnols (XVIe siècle), les colons s’installent sur le nouveau continent. Ils s’approprient des terrains et construisent des villages ; Ramenant sur leurs bateaux ovins et bovins pour alimenter leurs fermes.
La chasse intensive et la clôture des terrains appauvrit la patagonie de ses animaux sauvages. Faute de guanacos, les selk’nam (peuple fuégien, renommé patagons par Magellan) pour se nourrir commencèrent à chasser… les moutons ! Ces mêmes parqués dans les estancias des colons.
L’histoire fait sourire. Mais qu’est-ce que la propriété pour des personnes étrangères à cette civilisation ? Comment concevoir l’appartenance des bêtes à un homme, quand on a toujours côtoyé que les grands espaces et ses animaux sauvages ?
C’est sur ce prétexte que débuta le massacre des indiens. Pratique qui se répand au XIXe, quand les oreilles ou testicules de ceux que l’on appelait sans distinction « les voleurs de bétails » seront monnayés. Avant qu’une guerre (Conquête du désert) visant à éradiquer des terres les « sauvages résistants » ne soit mené par Julio A ROCA en 1879.
Aujourd’hui, il ne reste des selk’nam que le nom de la région : Patagonie.
« Le loup l’emporte et puis le mange. Sans autre forme de procès. »
Plus au nord, côté Argentin, les tribus indiennes subiront les mêmes oppressions.
Nous sommes près de Salta. Dans le nord-ouest du pays. Nous campons dans un décor tout droit sorti d’un western. La flamme du feu de camp vacille, et à cet instant j’en suis convaincue, ils vont surgir! Plumes sur la tête, et main devant la bouche, ils viendront danser autour de nous et partager leurs histoires …
Au petit matin la lumière se lève sur le plateau. Pas d’indiens. Juste cet espace aux couleurs vives. Ici, la cordillère fait barrage aux nuages. Faute de pluie, la végétation est plus rare. Les flancs teintés des montagnes et la roche rouge feu des canyons se dénudent pour contraster plus encore avec le vert des cactus.
Ces mêmes cactus jadis complices des tribus de la région.
L’histoire raconte qu’au XVIe siècle, pris de court par l’arrivée des premiers conquistadors espagnols, les caciques de la région d’Humahuaca (chef de tribus) se réunirent. Non préparés et en franche infériorité numérique, l’affrontement leur était de toute évidence peu favorable. Ils réquisitionnèrent alors tous les tissus et vêtements de la vallée pour habiller les cactus des crêtes voisines.
A la vue d’une telle armée, les espagnols choisirent de contourner la région, offrant ainsi quelques dizaines d’années de répit aux populations locales.
Elles seront ensuite à leur tour victimes d’expulsion, de chasses sanglantes, de conversion par les jésuites, et de maladies venues d’Europe (typhus, variole)…
A ce jour, les rares tribus (Mapuches essentiellement) restantes ont enfin gagné un peu de tranquillité.
Si les indiens d’Amériques ont été décimés, les moutons et bœufs eux, ont bien prospéré.
Légion en Argentine, pas un repas sans barbecue.
(Pour l’anecdote) Interrogés par notre salade de pâtes, nous nous sommes vues offrir de belles pièces de viandes pour l’accompagner par nos voisins de campings (une famille d’argentins).
Si le Chili a frustré nos papilles, la gastronomie d’argentine nous a davantage séduit.
Empanadas, humita, tamales, barbecues arrosés d’un verre de Malbec… Autant de saveurs qui nous rappelleront à ce voyage.
(Pas de panique amis végétariens, beaucoup d’options délicieuses végé que nous avons aussi pris plaisir à essayer)